Article (en français) et photographies argentiques originales noir et banc de l’auteure parus dans Fictions et images du 11 septembre 2001, Cahier Figura dirigé par Bertrand Gervais et Patrick Tillard, Montréal : Figura, Centre de recherche sur le texte et l’imaginaire, coll. Figura, vol. 24, 2010. En ligne sur le site de l’Observatoire contemporain.
Communication présentée lors de Fictions et images du 11 septembre 2001, colloque organisé par le Figura, Centre de recherche sur le texte et l’imaginaire, ÉRIC LINT et le Laboratoire NT2, Université du Québec à Montréal, Montréal, 14-15 décembre 2007.
CRÉDIT: Photographies argentiques, Louise Lachapelle, Décharge de Mbeubeuss, tirées de la série MUR_MAISON_DÉPOTOIR, Dakar, Sénégal, 2007-2010.
Le 11 septembre est, sans contredit, un événement historique, au même titre que les autres grands événements du XXe siècle. Mais c’est aussi, comme le mentionne Baudrillard, un événement-image, un événement à grand caractère photogénique, qui impose sa propre réalité, poussant à leur limite les différences entre le réel et l’imaginaire, l’avéré et le fictionnel. «L’image consomme l’événement, au sens où elle absorbe et le donner à consommer. Certes elle lui donne un impact inédit jusqu’ici, mais en tant qu’événement-image.»Nous avons tous encore en tête certaines des images de cet événement, que ce soit l’avion qui percute la seconde tour, moyen de transport converti en missile, les gratte-ciels du World Trade Center, symboles de la puissance économique américaine, transformés en cible, les jumpers et les falling men, le travail des policiers et des pompiers, l’effondrement des tours, le Ground Zero avec ses restes de façades et son amoncellement de décombres, la présence immédiate et incontournables des médias électroniques, etc.
Il s’agit d’une nouveau répertoire d’images, des éléments d’un imaginaire de la fin, générant sa propre logique de mise en récit et ses propres figures. Dans ce contexte, il devient pertinent de s’intéresser, comme le fait Louise Lachapelle dans son article, aux restes de l’histoire, restes que les processus de symbolisation ont tendance à négliger. Les images des édifices en ruines étaient saisissantes, mais où sont allés les décombres? Dans quelle décharge publique? Et comment faire le tri, afin de récupérer certains restes humains qui ne manqueront pas de s’y retrouver? À quel chantier a-t-on droit? Beaucoup plus que l’impact humain de l’immense dépotoir engendré par les 1,8 millions de tonnes de débris, c’est une nouvelle forme de collection qui se constitue par le tri des vestiges des tours. Une collection d’artefacts, un corpus de références afin de «communiquer les proportions catastrophiques de l’attaque» comme le souligne Louise Lachapelle.
Bertrand Gervais et Patrick Tillard
Extrait de «Ground Zero», Fictions et images du 11 septembre 2001
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